Au collège, des filles de ma promotion sont tombées enceinte et se sont retrouvées hors de l’école. Elles n’ont toutes pas eu la chance de faire un apprentissage ou une formation pratique pour s’insérer professionnellement. À l’époque, on se moquait de ses filles. Puis, en classe de première, j’ai été sélectionnée boursière du programme égalité genre de Peace Corps. Grâce à ce programme, j’ai eu accès à des informations sur la santé sexuelle et reproductive, sur la prévention des grossesses précoces.

Progressivement, j’ai réalisé que c’était comme un privilège pour moi d’avoir accès à ces informations. Parce que, d’autres filles avaient aussi besoin d’être informées sur ces notions. Cependant, elles n’étaient pas toutes bénéficiaires du programme. Il fallait trouver une approche pour informer ses filles également. C’est ainsi que je me suis engagée pour la prévention des grossesses précoces en milieu scolaire. J’ai commencé au collège avec les sensibilisations via le théâtre et la poésie.  

Après mon Bac en 2018, j’ai organisé avec une amie le programme vacances saines sans grossesses précoces à AVRANKOU au profit des élèves. J’ai relayé les actions de sensibilisations menées dans le cadre de ce programme sur ma page Facebook. Toujours en 2018, j’ai été impliquée dans les ateliers de productions artistiques pour la lutte contre les mariages des enfants avec UNICEF et le ministère des affaires sociales du Bénin. Aussi, je partageais mes points de vue sur les droits des enfants et surtout des filles. Les gens ont commencé par m’appeler activiste pour les droits des enfants.

Au début, je n’ai pas cherché à comprendre le sens du mot. Dans activiste, je voyais un autre mot : active. Je m’active à travers des actions pour les droits des enfants. Je suis donc activiste. C’est le premier sens de l’activisme dont je me suis approprié. J’ai continué dans la même lancée avec des actions : sensibilisations, émissions, camps, plaidoyers, programme académie des jeunes filles leaders, le camp de construction des rêves pour les filles…

Ce qui me motivait et me motive, c’est l’action. Ma définition de l’activisme est simple : engagement + action au service d’une cause, défier le statu quo, agir pour faire bouger les lignes, impacter des vies. Deux réalisations dont je suis fière en tant qu’activiste : le programme académie des jeunes filles leaders et le camp de construction des rêves pour les filles.

Webactivisme

Les réseaux sociaux peuvent permettre de relayer les actions, partager des contenus pour susciter le débat et motiver une prise de conscience. Le numérique est un atout pour l’activisme. Le webactivisme est chic et stylé. On peut toucher la masse, interpeller des autorités, interagir sur des plateformes avec des personnes, utiliser le blog…une action peut commencer en ligne et finit hors ligne. Pour exemple, nous avons rencontré les filles à MEDEDJONOU pour une session sur l’estime de soi et leurs rêves. L’idée a germé sur twitter.

En 2019, grâce à l’appui de Oxfam au Bénin, j’ai participé à la réunion des activistes féministes numériques en Afrique du Sud. J’ai rencontré de formidables personnes avec des solutions innovantes aux problèmes de leur communauté lors de cette réunion. Toutes avaient un point en commun : usage des réseaux sociaux pour amplifier leur voix et toucher la masse.

Internet donne une nouvelle dimension à l’activisme. Tout dépend de ce qu’on fait sur les réseaux sociaux. L’activisme peut exister sans les réseaux sociaux. Les actions directes sur le terrain seront prioritaires. Mais, les réseaux sociaux font partir de notre quotidien aujourd’hui. Il serait un peu utopiste de ne pas mettre ce potentiel au service d’une cause. Je ne pense pas que les webactivistes sont moins activistes que d’autres. La finalité, c’est impacter une communauté et motiver un changement de comportement. Il ne faut juste pas oublier cet idéal peu importe notre espace d’action.

L’activisme est un boulot ?

Je n’ai pas encore vu de profession intitulée : activisme. Je n’ai pas encore croisé un ou une activiste qui m’a dit qu’il ou elle veut faire une profession activisme. Peut-être que cela existe ou va exister. Je ne sais pas. Toutefois, notre profession peut être liée à notre activisme. Un journaliste peut être activiste pour la liberté de presse. Une activiste engagée pour l’égalité genre peut prétendre à une carrière en tant que gestionnaire des projets de développement liés au genre.

L’activisme est une volonté d’aider l’humanité. C’est un combat que l’on porte, une mission que l’on s’assigne, une passion que l’on habite pour apporter des changements positifs dans la communauté. On est activiste pour défendre des causes qui nous tiennent à cœur, des problèmes dont la résolution pourrait nous apporter une paix avec nous même, une harmonie intérieure, un bien-être psychologique que même un boulot pourrait ne pas nous procurer.

L’activisme n’est pas forcément un travail pour lequel l’on a un CDI. Mais il nourrit son Homme. Ce repas de l’âme, cette couverture de l’esprit, cet apaisement inexplicable que l’on ressent, cette sensation de vie, ce soupir que les pièces sonnantes ne pourront marchander, ce regard d’accomplissement, ce petit doigt qui vous mijote que vous avez fait quelque chose de grand en apportant votre contribution, ce sommeil réparateur que vous avez après chaque action salvatrice, cette condition pacifique qui vous habite.

Toutefois, l’activisme peut nous amener en tant qu’acteur de terrain agissant pour une thématique à faire des consultations pour des organisations. Dans ce contexte, un contrat peut intervenir. Une ou un activiste peut être impliqué.e sur une campagne, une mission. Aujourd’hui, on peut susciter l’activisme d’une tierce personne. Dans ces cas, les activistes suscités, s’ils ou elles n’avaient pas des convictions liées à la cause défendue, pourraient ne pas tenir dans ce que j’appelle Advocacy Work. Découvrez le récap du facebook chat sur l’activisme ici.